Face à une oeuvre d'art, nous sommes libres de projeter tous nos désirs, nos fantasmes, nos "filtres de perception" en interprétant cette oeuvre, en l'aimant ou en la détestant.
La projection est habituellement un problème en ce qu'elle nous masque l'objectivité d'une situation, par exemple lorsque nous interprétons une situation du passé avec nos yeux du présent, ce qui nous conduit à être un juge implacable de nous-même par exemple. Ou bien lorsque nous extériorisons vers autrui des choses que nous détestons chez nous-même, ce qui nous rend injuste à son égard. C'est la raison pour laquelle nous nous énervons parfois contre nos enfants qui nous montrent cruellement en miroir nos propres défauts.
Mais avec l'oeuvre d'art, cette identification ou cette projection non seulement ne porte pas à conséquence mais nous permet en plus de mieux nous connaitre. De plus, face à l'oeuvre d'art, notre désir de dominer, de plaire, de séduire ou de posséder s'éteint, laissant place à de la pure contemplation, activité tout à fait reposante et salutaire pour celui ou celle qui est "fatigué de désirer" (donc de manquer pour s'en tenir à une définition purement platonicienne du désir).
Le reste du temps, projeter nos désirs, nos représentations, nos fantasmes sur autrui ou sur une situation crée de nombreux problèmes : déceptions, conflits, malentendus, échecs.
Pour nous en prémunir, nous n'avons d'autre choix que de multiplier les représentations sur un même phénomène et de les croiser et les confronter ensemble afin de dépouiller nos représentations de toutes les scories de notre subjectivité, qui a tendance à nous faire prendre "des vessies pour des lanternes" et nos "désirs pour la réalité". Ne jamais confondre ce qui est et ce qui doit être, la réalité telle qu'elle est et celle que nous voudrions faire advenir. Principe d'humilité et de clairvoyance.
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