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La consultation philosophique pour les gens débordés




L’hyper-concentration et la “vectorisation*” de la pensée induite par la consultation philosophique permet d’oublier momentanément ses problèmes et de donner un coup de balais dans son esprit. Après quelques séances l’esprit est à nouveau clair pour fonctionner efficacement et ne plus se laisser polluer par tous ces parasites qui surchargent nos processus mentaux et nous font nous faire du souci pour rien.

En ceci la consultation philosophique constitue une forme de méditation active.

Premièrement elle oblige à se concentrer sur une nombre très limité de choses, de concepts ou de phrases. La conceptualisation en particulier, oblige à trouver un seul mot derrière une proposition, ce qui constitue son essence. Une fois le mot trouvé il agit puissamment sur l'esprit comme un aimant qui attire à lui d'autre concepts, il creuse une espèce de trou ou produit un appel d'air qui fait respirer la pensée et réorganise le sens autour de ce mot.

 

L'extrême attention du Sujet que requiert la consultation l'oblige à évacuer tout ce qui est extérieur au dialogue. Toutes les tâches exigées par l'entraîneur-philosophe-praticien nécessitent l’engagement existentiel du Sujet, son corps et son esprit, qu’il s’agisse de répondre à une question en une seule phrase, de trouver un lien conceptuel entre des propositions, de poser une question claire et non rhétorique, de faire une objection sur un point précis ou de voir un problème dans une proposition.


En temps normal l'esprit du Sujet va dans tous les sens, il est éparpillé dans plusieurs tâches, entre plusieurs opérations mentales sans lien entre elles et pour lesquelles il s'est donné une obligation, qu'elle soit professionnelle ou personnelle. Au travail il se peut qu'il soit amené à faire des tâches qui nécessitent de la concentration et de la réflexion. Mais il est tellement souvent interrompu par d'autres "priorités" qu'il a l'impression de stagner, de faire du sur-place, et d'empiler les to do lists sans être sûr ni que ces tâches ont vraiment du sens, ni qu'une fois accomplies elles seront utiles à quelqu'un. Il y a donc une forme de perte de sens, d'absurdité, amplifiée par le fait que souvent les tâches qui sont demandées s'insèrent dans un projet ou un programme dont on ne connaît pas la finalité. Ainsi nous avons une intuition vague de contribuer mais nous ne savons ni à quel niveau ni à quelle importance. Notre contribution est dissoute dans la masse des projets ce qui procure un sentiment d'aliénation.

Au contraire travailler sa pensée redonne au Sujet une forme de contrôle sur lui-même et sur sa vie, avec le sentiment qu’il augmente la puissance de penser et d’exister ce qui a pour effet secondaire non négligeable de provoquer une forme de joie subtile.

Deuxièmement le Sujet se débarrasse de toutes ses ruminations, il élague ses phrases de tous les mots parasites qui les surchargent, il stoppe les processus mentaux annexes liés à la peur du jugement sur soi : “Que va-t-on penser de moi ? Suis-je bien certain de ce que j’avance ? Est-ce que je ne vais pas le blesser si je dis cela ? Est-ce qu'il cessera de m'aimer si je lui dis la vérité ? J’aurai l’air ridicule si je me trompe…”

La première urgence pour penser est de faire cesser l’urgence

Toutes ces questions qui ne sont pas de vraies questions mais des inquiétudes, des anxiétés, disparaissent car le praticien vous intime de répondre à la question qui est importante ici et maintenant, celle du dialogue en cours. Tout le reste disparaît : il faut faire le travail même si cela nous apparaît secondaire ou moins “vital”. La première urgence pour penser est de faire cesser l’urgence. On apprend à lâcher son coup, à dire les choses sans prendre toutes les précautions oratoires et sans craindre la réprobation du professeur, du manager ou du collègue. On s'engage dans des hypothèses mêmes hasardeuses et on se risque à penser : pour penser il faut s'engager dans l'incertitude et pas faire le bon élève. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les bons élèves ont souvent du mal avec la philosophie et a fortiori avec la pratique philosophique. (La bonne élève)

Ni futur ni passé dans cet exercice : seule la force de la pensée qui se déploie ici et maintenant, avec ce que nous sommes et pas ce que nous fûmes ou ce que nous voudrions être

Troisièmement le philosophe-praticien, par ses questions incisives, oblige le Sujet à être de plain-pied avec lui, à être présent à lui-même et à autrui sans se laisser distraire par tout ce qui pourrait l'en sortir. Ni futur ni passé dans cet exercice : seule la force de la pensée qui se déploie ici et maintenant, avec ce que nous sommes et pas ce que nous fûmes ou ce que nous voudrions être. Le praticien est dans la tête du Sujet et le Sujet est dans la tête du praticien.

C'est la raison pour laquelle je recommande cet exercice particulièrement quand nous sommes débordés, perdus, "sous l'eau" : il donne de l'air, il permet une respiration au prix il est vrai d'un court mais réel moment de désorientation.

Quand on est débordé, quand on ne sait plus où donner de la tête c'est que l'on a renoncé implicitement à faire des choix et petit à petit voilà que nous renonçons même à toute hygiène mentale. Nous nous donnons bien cet espace de liberté pour notre corps, lorsque nous allons à la gymnastique ou à quelque autre sport, alors pourquoi ne nous le donnons-nous pas pour notre esprit ? A priori ce dernier est au moins autant utilisé que notre corps au quotidien, enfin j'ose l'espérer pour la plupart d'entre nous. A moins qu'il ne soit complètement laissé en jachère auquel cas il convient de le remettre au travail avant qu'il ne soit définitivement trop tard.

 

 * Pendant une consultation, on demande d'appliquer sa pensée sur un object précis (un concept par exemple), dans une direction précise (faire le lien entre ce mot et un autre concept) et avec une intensité maximum (faire une phrase courte). La vectorisation est une métaphore tirée des sciences physiques où un vecteur symbolise une force avec une origine, une direction, un sens et une intensité.

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